À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Cherchant en pleine nuit une station-service pour faire le plein, une femme s’engage dans un stationnement souterrain sur la foi d’informations qu’on lui a données. Incapable de trouver la sortie, elle rencontre un homme en uniforme qui se dit colonel. Il est, en fait, le gardien du parking mais il ignore comment sortir de ce labyrinthe. Une fillette indiquera à la conductrice hébétée la voie qui mène à l’extérieur.
Autres parutions
Commentaires
Dans « Paradise Underground », titre ironique et grinçant, Marc Sévigny développe une superbe métaphore sur l’Amérique en la comparant à un immense parking (ce qu’elle est aussi au sens propre), véritable labyrinthe moderne où il est impossible de trouver sa voie.
Dans la société américaine, l’automobile a contribué à l’édification du rêve américain. Elle symbolise la réussite sociale. Or, sans l’homme pour la conduire, elle est une carcasse vide, inerte et dérisoire. Le parking souterrain qui en est rempli fait figure de cimetière d’une civilisation. La présence humaine n’est plus assurée que par un gardien qui joue un rôle en revêtant l’uniforme d’un colonel et par un gérant absorbé par une partie de cartes.
Il est ironique de constater que l’automobile, instrument par excellence de la mobilité, est abandonnée sur un espace de stationnement comme si la société s’était fossilisée. Il faudra un enfant pour indiquer la sortie à la jeune femme car les adultes n’arrivent plus à se retrouver dans le monde qu’ils ont construit et refusent d’assumer leurs responsabilités, soit par peur de déplaire, soit par indifférence à l’égard d’autrui.
Marc Sévigny brosse ici le portrait saisissant d’une société décadente dont le seul espoir repose sur l’enfant. Cette « vue partielle de l’enfer », cette illustration du cauchemar climatisé qu’est l’Amérique du Nord, s’impose comme l’une des meilleures nouvelles de l’auteur. [CJ]
Source : L'ASFFQ 1988, Le Passeur, p. 268.