À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Dans le monde de Tourmaline, où la communication se fait essentiellement par télépathie, Anavrin visite une galerie d'Art envahie par les illusionnistes, miniaturistes et performeurs. Il découvre avec stupeur qu'une des œuvres exposées, un tableau appelé Éclosion et signé Xaire, est identique à l'une de ses créations : Clandestinité, du mouvement transréaliste. Il porte donc plainte pour plagiat auprès de l'Inquisiteur Japique et Xaire est cité à un procès. Mais Xaire est aussi étonné que son accusateur de la ressemblance. Faute de preuve, le procès est ajourné. Puis Anavrin aperçoit dans une autre galerie un second tableau de Xaire, correspondant cette fois à l'œuvre que son propre esprit est en train d'élaborer. Il développe alors l'hypothèse selon laquelle les deux artistes partageraient le même subconscient. Envahissant l'esprit de son rival, il lui commande de détruire ses tableaux, ce que fait Xaire qui est en train de devenir fou. C'est à ce moment qu'Anavrin comprend ceci : le titre étant partie intégrante d'une œuvre, il n'y a jamais eu plagiat puisque les titres des tableaux différaient. Il tente en vain de recontacter télépathiquement Xaire, puis il devient fou à son tour. Les subconscients des deux artistes étaient peut-être bel et bien connectés l'un à l'autre.
Commentaires
La télépathie étant un des thèmes-ingrédients les plus fréquents de la science-fiction, surtout d'une science-fiction plus vieille, je me prends à m'étonner devant un texte moderne qui en fait son point central. Surtout qu'à ce propos, Lise Morin n'innove pas. On aura cependant raison de répliquer que la télépathie n'est pas tout dans cette nouvelle, la création artistique en constituant le véritable sujet. Précisons : la création artistique dans un univers de télépathes, ce qui implique d'éventuels plagiats difficiles à prouver, et c'est précisément là-dessus que porte l'intrigue. L'idée était intéressante, d'ailleurs le début du texte est accrocheur. On s'attend à une confrontation entre Anavrin et Xaire, à une lutte qui ne ferait que s'amplifier. Mais ça ne se passe pas ainsi. Le déroulement de l'intrigue est plus ardu que prévu, le dénouement est décevant, facile. La conclusion ne convainc pas, parce qu'on s'attendait à plus fort. Il arrive que des auteurs soient, comme on dit, dépassés par leur sujet. Lise Morin a visiblement beaucoup d'imagination, on le voit par sa description du monde de Tourmaline, mais elle a eu ici des difficultés à composer une histoire cohérente et qui réponde à ses promesses.
L'écriture de Lise Morin est parfois précieuse, le vocabulaire châtié, ce qui donne inévitablement au texte une connotation humoristique. Cela est probablement voulu pour souligner la vanité des personnages (artistes, magistrat). L'auteure se laisse parfois aller de façon excessive au plaisir de produire des phrases, comme si son style manquait de retenue, de simplicité. Certains dialogues, par exemple, prennent trop de place, compte tenu de leur importance dans le récit. Quant aux réflexions philosophiques d'Anavrin sur l'Art et le destin, je ne crois pas que l'auteure tienne à ce qu'on s'y arrête. Encore là, elles servent sans doute à illustrer un trait de caractère du personnage central.
« Le Plagiat » n'est pas un texte médiocre. Il ne va tout simplement pas au bout de ses possibilités. [DC]
- Source : L'ASFFQ 1985, Le Passeur, p. 82-83.