À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Au XXIVe siècle, à la suite de la victoire de la Fédération Tellurienne sur les Zorbukênes, la planète Uga subit l’hégémonie terrienne. Au fil des décennies, les Ugatiens acquièrent des connaissances, prennent conscience de leur identité et réclament leur autonomie politique. Les Ugatiens accèdent bientôt au rang des nations souveraines.
Commentaires
Sous-titré “fable”, le texte de Marc Vaillancourt se présente comme une chronique condensée du passage d’une civilisation primitive à une civilisation évoluée, avec ce que cette évolution technologique suppose de bons et de mauvais côtés. Ainsi, pour défendre sa récente prospérité, Uga doit se doter de la bombe à anti-matière.
« Planète avec vue sur Sirius » commence comme une histoire classique de SF. Le récit rappelle les principales étapes de la colonisation de cette planète où vivent des êtres primitifs sous le joug des Zorbukênes. D’un impérialisme à l’autre, le sort des Ugatiens n’est guère plus enviable.
Puis, l’auteur pige à gauche et à droite dans l’histoire mondiale du XXe siècle sur la Terre (le bombardement atomique d’Hiroshima et de Nagasaki) en transposant les événements dans un contexte interstellaire. Au fur et à mesure que progresse le récit, Marc Vaillancourt intègre des épisodes de l’histoire du Québec dont on n’a aucun mal à identifier les principaux acteurs. Avec l’arrivée en scène de Le Noblet, gouverneur fantôche d’Uga qui signe avec la Fédération un contrat de vente de minerai de fer à 15 cents la tonne, nous voilà plongé à l’époque de Maurice Duplessis. On reconnaît au passage Pierre Elliot Trudeau sous les traits du général Tipett, commandant en chef des armées telluriennes, dont l’histoire a retenu son « mange de la marde ! », et René Lévesque sous les traits de Monsieur Prélat, âme de la dissidence.
Tout en conservant son caractère de fable – l’auteur prend des libertés avec l’histoire –, le texte de Vaillancourt se double graduellement d’un manifeste en faveur de l’indépendance du Québec. Dès lors, le ton devient plus léger et l’humour descend d’un cran, plus proche du burlesque que de l’ironie. L’intérêt persiste mais le charme de l’altérité est quelque peu rompu.
« Planète avec vue sur Sirius » est plus qu’un titre alléchant qui m’avait séduit au départ. Le texte de Vaillancourt est une fable qui fait le procès de l’évolution et du progrès humains et une métaphore politique sur le Québec. Il n’est pas courant de voir une telle représentation du Québec en SF. Il y a eu le controversé « 1534 » de Denis Côté en 1985 et « Un pas de plus » de Geoffrey Edwards en 1987.
Il faudra surveiller de près cet auteur. Son premier texte n’est pas mauvais du tout, croyez-moi. [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1990, Le Passeur, p. 193-194.