À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Las d’entendre tout un chacun invoquer à tort et à travers son nom dans ses conversations, Satan choisit un homme pour le défendre et rétablir sa réputation. C’est ainsi que, tard dans la nuit, le narrateur découvre, en rentrant chez lui, le Diable bien assis dans son fauteuil, les pieds dans ses pantoufles neuves. Méphisto lui fait part de ses griefs…
Commentaires
« Satan en pantoufles » est l’œuvre d’un amoureux de la langue qui s’amuse à relever les nombreuses expressions populaires dans lesquelles apparaît le mot diable : « Va au diable », « Que le diable emporte tout », « Ça parle au diable », « Le diable s’en mêle », etc.
Ainsi passé dans le langage courant et en quelque sorte apprivoisé, il n’est pas étonnant que le diable, représenté ici, soit dépouillé de ses attributs classiques : pas de cornes, pas de queue, pas de fourche. Au fond, ce diable-là fait bien pitié : il en a assez de voir son nom prononcé en toutes circonstances, la plupart du temps de manière peu flatteuse, voire diffamatoire.
Cela dit, le quasi-monologue du roi des enfers ne génère aucune montée dramatique. De plus, le diable dit au narrateur l’avoir choisi pour lui confier une mission, soit défendre sa réputation mise à mal par les expressions familières de ses contemporains, mais l’idée, malheureusement, n’est pas développée. La finale s’avère un peu abrupte et précipitée.
Par contre, Jean D’Argey a du style et un esprit fin : il en faut pour retourner comme un gant les expressions, en faire voir un sens différent en adoptant le point de vue de Satan. Il est aussi capable de surprendre avec des images joliment tournées : « Quand je quittai mes amis, l’heure du berger était passée depuis bien des tours d’aiguilles, et l’heure du laitier s’annonçait à grand fracas de bouteilles. » Quelle merveilleuse façon d’indiquer l’heure !
Un texte de lecture agréable, intelligent, mais aux ambitions, tout bien considéré, assez modestes. Ce qui n’est pas un défaut en soi. [CJ]