À propos de cette édition

Éditeur
Le National
Genre
Fantastique
Longueur
Feuilleton
Paru dans
Le National, vol. XI, n˚ 125
Pagination
2
Lieu
Lowell (Massachusetts)
Date de parution
07 novembre 1893

Résumé/Sommaire

Un chevalier cruel et aux mœurs dissolues, Sigefroy, sire d’Ansembourget, convie ses amis et ses voisins à une grande chasse à courre sur son domaine seigneurial. Au cours de l’expédition, il se lance à la poursuite d’un sanglier mais son cheval trébuche et Sigefroy doit rentrer à pied au château. Cependant, il n’arrive pas à s’orienter en forêt et la nuit le surprend dans les bois. Soudain, une forme sombre se dresse devant lui. Le diable lui apprend qu’il mourra au douzième coup de minuit et que son âme lui appartiendra. Satan appelle ses sujets et aussitôt, une ronde de squelettes se forme autour du chevalier pétrifié et désespéré. Au moment où va sonner le douzième coup, Sigefroy invoque le nom de Marie et il est sauvé. Il décide alors de léguer aux pauvres et à l’Église tous ses biens et de se faire moine.

Commentaires

Firmin Picard affectionne les sujets historiques : la Rome antique dans « Sacrifice à Minerve », la conquête de l’Amérique par les Blancs dans « La Montagne Tremblante ». Ici, il situe son récit à l’époque médiévale mais son Moyen Âge n’entretient aucune filiation avec celui de Walter Scott, auteur de plusieurs romans de chevalerie.

En effet, « Sigefroy ou le Chevalier maudit » n’est pas une œuvre de fantasy ou un récit d’aventures de chevaliers en quête de l’amour courtois ou du Graal. Ce conte n’a rien de romantique ou de divertissant, car l’intention de l’auteur est très claire : il vise à édifier le lecteur et à louer la commisération de la Vierge Marie. La conversion in extremis de Sigefroy démontre qu’il n’est jamais trop tard pour se repentir.

Firmin Picard pratique une forme de littérature religieuse dans laquelle les miracles jouent un rôle identique à celui des éléments fantastiques dans les textes profanes. Ce qu’il y a d’étonnant chez lui, c’est que le cadre historique de ses récits est éminemment universel alors que sa pensée est fortement marquée par le courant ultramontain de son époque.

Picard ne réussit pas à conserver un juste équilibre entre ses préoccupations religieuses et ses préoccupations artistiques. Cette carence est sans doute accentuée par une écriture sans grâce et sans personnalité. De plus, il confond les notions quand il déclare : « Les matérialistes ne sont point d’aujourd’hui, Épicure fut un de leurs maîtres. »

Bref, Firmin Picard est un prédicateur déguisé en conteur. Aujourd’hui, il serait sans doute télévangéliste. [CJ]

  • Source : Le XIXe siècle fantastique en Amérique française, Alire, p. 162.