À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Des rumeurs circulent sur le mystérieux moulin Van der Bruck. Est-il hanté comme plusieurs le croient ? Steve Chang et Marco Dubé, deux adolescents inséparables, décident de tirer l’affaire au clair. À la tombée de la nuit, bravant les bruits et les cris qui proviennent de la vieille bâtisse, ils s’introduisent dans le grenier du moulin. Ils sont surpris de constater que le bâtiment, décrépit à l’extérieur, est en excellent état à l’intérieur et très propre. Ils découvrent aussi que les lieux sont occupés clandestinement par des hommes armés. Ils sont bientôt repérés par un des bandits, mais l’intervention du fantôme Van der Bruck permet à Chang de neutraliser l’homme.
Le fantôme explique aux deux adolescents que son moulin sert de repaire à une dangereuse bande de trafiquants qui y entreposent leur marchandise. Il demande aux deux amis de l’aider à mettre fin au trafic de la bande. Le fantôme les conduit à un passage secret qui mène à une rivière souterraine débouchant sur le lac Champlain. C’est par cette voie que les trafiquants acheminent la drogue au moulin. C’est justement cette nuit-là du 16 juin que les malfaiteurs ont choisie pour transporter une très grosse cargaison de poudre blanche. Avec l’aide du spectre du propriétaire du moulin, Chang et Marco tentent de remonter la rivière pour alerter la police qui patrouille sur les eaux du lac Champlain.
Commentaires
Le Spectre Van der Bruck est le premier des deux romans de la série Les Aventures de Chang et de Marco. Petit clin d’œil de l’auteure Anne Richter (qui écrit sous pseudonyme) dès la page titre : elle dédie le livre à Carmen (Marois, le vrai nom de l’auteure). D’entrée de jeu, on peut se demander s’il était vraiment nécessaire de dresser la liste des personnages du roman avant même d’en entreprendre la lecture. Il y a deux personnages principaux et deux personnages secondaires. On n’est pas dans un roman russe de cinq cents pages ! En outre, l’information livrée est très rudimentaire. Voyez ! « Steve Chang : un Chinois d’origine vietnamienne, compagnon d’aventures de Marco. Marco Dubé : le compagnon d’aventures de Chang. » Formidable ! Visiblement, la collection L’Heure Plaisir s’adresse à des lecteurs débutants.
Ce que je déplore le plus, cependant, c’est le manque d’équilibre dans la représentation des deux membres du tandem. Anne Richter a trop voulu jouer la carte des contraires qui s’attirent même si, pour des raisons différentes – et qu’elle n’explique guère dans le cas de Chang –, les deux copains partagent le statut d’exclu. Steve Chang est intrépide, courageux, athlétique et déterminé. Marco est lourdaud, peureux, indécis et plutôt passif. Il ne pallie pas ses faiblesses par une intelligence qui serait supérieure à celle de Steve. Le duo est vraiment trop inégal pour être crédible.
Le Spectre Van der Bruck est assurément un roman fantastique en raison de la présence du fantôme du propriétaire du moulin, mais c’est aussi et surtout un roman d’aventures. En effet, contrairement au cas du fantôme qui doit revenir sur terre pour expier une faute, comme dans « Le Fantôme de l’avare » d’Honoré Beaugrand, le spectre n’est pas motivé dans son action par une possibilité de rédemption. Il ne cherche pas non plus à se venger de celui ou de ceux qui l’ont assassiné il y a cent soixante-cinq ans, comme on pourrait s’y attendre. Il veut tout simplement débarrasser son moulin des trafiquants de drogue qui y ont établi leur repaire.
L’aide qu’il apporte aux deux adolescents en usant de quelques prodiges non violents s’inscrit davantage dans une perspective d’assainissement de la société – motivation à l’origine de la plupart des enquêtes criminelles et poursuites décrites dans les récits policiers, Van der Bruck étant ici un adjuvant utile – que dans un cheminement moral qui donnerait au roman son sceau d’authenticité fantastique et une plus-value littéraire. Anne Richter conserve tout de même du conte de Beaugrand l’idée de la date anniversaire de l’événement tragique. Le spectre de Han Van der Bruck ne se manifeste en effet qu’une fois par année, jour anniversaire de son assassinat.
Le roman d’Anne Richter est mené rondement, sans véritable temps mort, et n’utilise pas à outrance les pouvoirs du deus ex machina que représente le spectre. Cependant, il n’y a là rien de particulier qui le distingue vraiment de la production courante, malheureusement. Cela et le duo trop contrasté expliquent peut-être la brièveté de la série car, enfin, on n’entreprend pas une série dans la perspective de publier seulement deux titres… [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1993, Alire, p. 157-159.