À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Le Tilbû émerge d’une longue hibernation. La rencontre d’une femelle Khô fait ressurgir en lui le souvenir d’une vie antérieure : il reconnaît en cette Khô sa fille Amalia qu’il a autrefois tant aimée. Le Tilbû doit donc connaître à nouveau la souffrance et la peur, signe que son cycle de vie(s) n’est pas achevé. Avant de plonger dans le ventre du Néant (de la mer), il initie la Khô à l’écoute des voix intérieures qui guident les êtres d’une vie à l’autre. La Khô/Amalia s’ouvre à ces voix de la mémoire puis reçoit en son sein, quelques années plus tard, l’âme du Tilbû désireuse d’être réincarnée près de celle qu’il a retrouvée. La Khô enfantera un être androgyne (l’Œil) qui possède la Connaissance et la Mémoire universelles.
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Commentaires
Annick Perrot-Bishop aborde dans ce texte à forte résonance mythique le thème de la réincarnation. L’histoire se déroule dans un futur très éloigné, sur une planète qu’habitent d’étranges créatures d’apparence et de mœurs distinctes (les Bhals, les Khôs et les Fulas). L’auteure s’attarde plus particulièrement à la tribu des Bhals dont est issu le Tilbû. Les Bhals ressemblent à de grandes bêtes à fourrure et usent d’un langage très complexe. Ils craignent l’influence des lunes Lan et Lur, les “Jumeaux de la nuit”, et valorisent hautement “l’esprit” qui veille à l’ordre des choses. Les Bhals cherchent à créer des liens entre le Visible et l’Invisible et se livrent, dans ce but, à certains rituels saisonniers (chants, danses, cérémonies, orgies libératrices, etc.).
« Spirales de l’amour-mémoire » décrit en fait une quête spirituelle. La vie (de la naissance à la mort) est ici considérée comme une épreuve initiatique. Elle se répétera des milliers de fois et en des lieux différents jusqu’à ce que l’être atteigne la parfaite maîtrise de son corps et de ses émotions, et accède à la mémoire universelle : « Autour de moi vibre un monde que j’ai déjà connu. Dont je me souviens lorsqu’il n’était qu’une boule incandescente tournoyant dans l’obscurité. J’ai tout absorbé dans mon immense mémoire. » L’Œil a réussi à démêler les “boucles inextricables” du Temps. Ce Tilbû réincarné nous est présenté comme un dieu – un être désincarné – qui aurait été guidé par l’amour.
Le récit se divise en trois parties. La progression spirituelle est marquée par le changement de voix narratives d’une partie à l’autre – du IL au JE. Les deux premières parties concernant le Tilbû et la Khô ont respectivement été écrites à la 3e et 2e personnes. Dans la dernière partie, l’Œil s’exprime dans un JE qui représente la totalité de l’être. Les voix du Tilbû et de la Khô ont en quelque sorte été intégrées à celle de l’Œil. L’utilisation du chiffre 3 – trois personnages et trois parties – n’étonne guère puisque ce chiffre symbolise dans la plupart des traditions religieuses l’achèvement de l’Unité divine (cf. Le Dictionnaire des symboles).
« Spirales de l’amour-mémoire » est un texte réussi, d’une écriture elliptique que maîtrise bien l’auteure. Les propos tenus restent cependant fort discutables… Cette longue nouvelle plaira sans doute aux lecteurs et lectrices qui partagent la vision de l’auteure. [RP]
- Source : L'ASFFQ 1988, Le Passeur, p. 138.