À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
La petite Caroline a persuadé ses parents de la laisser participer à un tirage, et ce n’a pas été facile. En dépit des probabilités, elle gagne le privilège d’expérimenter, chez elle, un tout nouveau jeu interactif, le Super Débile 5. Exploitant les techniques de la réalité virtuelle, le jeu captive Caroline, mais davantage encore son père, qui passe une nuit entière au sous-sol, jusqu’à triompher du premier niveau de difficulté.
Commentaires
C’est tout ? Eh oui, c’est tout ! Il ne s’agit que d’un court épisode, typographié en 14 points, avec interligne supplémentaire à tous les paragraphes (y compris chaque réplique des abondants dialogues) et généreusement illustré. Tout cela pour être considéré comme un « livre » aux fins des programmes de droit de prêt public et de droits de reprographie. Au point de vue diégétique, ce n’est en fait que l’amorce d’un ensemble qui sera vraisemblablement livré par tranches aussi minces ; pour le moment, cela ne constitue pas un récit en soi.
Je ne connais pas d’exemple d’exploitation plus cynique du système dans le domaine du livre jeunesse que l’entreprise d’auto-édition de Pierre Pigeon. Le contenu – le peu de contenu qu’il y a dans ces plaquettes – est parfaitement démagogique, il « pousse tous les bons boutons » auprès des jeunes : texte court, facile à lire, farci de « super », « débile », « capoté » et autres emprunts au riche vocabulaire des enfants – pourquoi leur apprendre de nouveaux mots quand ils en connaissent déjà une bonne centaine ? Dans les situations de la vie familiale, l’auteur, par l’entremise de sa narratrice, prend sans vergogne le parti des enfants, pour qui les adultes sont des fantoches un peu bornés, dont les entêtements parfaitement gratuits peuvent être vaincus par la ruse et la manipulation – de braves bêtes, au fond.
Et la SF ? En lisant Super Débile 5, on pourrait croire que la réalité virtuelle vient d’être inventée par Pierre Pigeon, mais enfin… Il la pousse, pour sa part, au-delà de ses limites actuelles, par une capacité de faire oublier la réalité tant les sensations sont réalistes et totales, ainsi que la capacité d’investir l’esprit du joueur et de l’asservir, dans une certaine mesure, à la manière d’une drogue.
À suivre, avec la même certitude qu’il y aura une nouvelle promotion McDo à l’hiver, puis une autre au printemps, avec les figurines tirées du plus récent succès cinématographique. [DS]
- Source : L'ASFFQ 1991, Le Passeur, p. 138-139.
Références
- Lapostolle, Lynn, Lurelu, vol. 15, n˚ 2, p. 20.