À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Sébastien Laroque, haïtien de naissance, voit sa vie ordinaire d’homme d’affaires plongée dans un « étrange vertige » : sa mémoire se trouble, une voix intérieure le harcèle, une ombre fugitive marche sur ses pas. Ce réseau de mystères culmine avec l’apparition d’un « vieil homme rachitique », dont les révélations lèveront le voile sur la véritable origine de Sébastien.
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Commentaires
Comme à plusieurs des textes de fiction de Stanley Péan, le thème de l’exil sert de mise à feu à cette nouvelle qui, ma foi, n’est pas mauvaise. Lieu de l’oubli, lieu de la métamorphose, l’exil arrache à l’homme les derniers vestiges du pays perdu, le confine à n’être jamais qu’un étranger, même chez lui : dissociation kafkaïenne entre l’être et le monde.
Cette thématique, dans « Le Syndrome Kafka », est d’autant plus judicieusement exploitée que l’exil n’est pas tant un rapport avec l’espace que l’inscription d’une coupure entre le réel et l’imaginaire. Loin de sa terre natale, Sébastien l’est tout autant de la réalité ; il serait au départ, nous dévoile-t-on, une image phantasmée par le vieux Prospère, image échappée de ses rêves pour se faire homme. Mais « on ne peut vivre sans ses rêves », se plaint-il, d’où le désir de réintégrer Sébastien dans sa tête. Par là, Péan semble lancer un appel à la fois de détresse et d’espérance ; d’une part l’exil, conçu comme dépossession du monde, comme aliénation, de l’autre, l’espoir de fonder un retour, de retrouver la trace de soi-même.
Le texte de Péan amorce une réflexion qui aurait gagné à être plus poussée, pas tant pour élever l’intention de l’auteur au-dessus de certaines ambiguïtés (l’ambiguïté n’est pas nécessairement une lacune) que pour rendre un son plus puissant de l’intériorité des personnages. Néanmoins, cette nouvelle ne manque pas d’authenticité. La langue, sobre et classique, sans nous faire vibrer comme on le souhaiterait, réussit à asseoir le récit sur une atmosphère inquiétante avec une certaine efficacité. Elle témoigne d’un talent certain, mais demande encore à être cristallisée. [FM]
- Source : L'ASFFQ 1988, Le Passeur, p. 132.