À propos de cette édition

Éditeur
La courte échelle
Titre et numéro de la collection
Roman jeunesse - 97
Genre
Fantastique
Longueur
Novelette
Format
Livre
Pagination
95
Lieu
Montréal
Année de parution
2000
ISBN
9782890214361
Support
Papier
Illustration

Résumé/Sommaire

Pierre et Ahonque vivent à Québec, dans la petite bourgade fondée par Champlain six ans plus tôt. Ils sont témoins des injustices commises envers les Amérindiens par certains soldats français qui échangent de l’eau-de-vie contre des fourrures. Jacques Cadorette est l’un d’eux et quand son ami Guy Morel accoste avec un groupe d’Algonquins, il lui fait part de son plan. Il veut se rendre en Huronie et y passer l’hiver afin de mettre la main sur les fourrures des Amérindiens en échange de quelques barils d’alcool. Mais il a besoin d’un interprète pour faciliter son commerce illicite. Il réquisitionne les services de Pierre et d’Ahonque et part avec les Algonquins vers le grand lac des Hurons. En route, les deux jeunes complices tentent en vain de percer les barils d’eau-de-vie.

À la fin de l’hiver, Cadorette et Morel, après avoir développé chez le chef Orani une dépendance à l’alcool, s’emparent frauduleusement des peaux de castor de la tribu et mettent le cap sur Québec. Pierre et Ahonque se lancent à leur poursuite. Les deux trafiquants et leurs guides algonquins sont attaqués par les Iroquois au moment où les deux jeunes complices sont sur le point de les rejoindre : Morel est tué, tandis que Cadorette est fait prisonnier, de même que Ahonque. Désespéré et affaibli, Pierre rentre à Québec grâce à l’intervention du cerf aux bois magiques.

Au début de l’automne, le jeune garçon accompagne Champlain dans une expédition contre les Iroquois qui doit sceller l’union des Français avec les Hurons. Ahonque, qui a guéri le fils du chef iroquois Noqhwa et jouit d’une liberté relative, profite de la confusion créée par l’attaque pour s’enfuir et rejoindre son inséparable ami français. Quant à Cadorette, qui avait été libéré plus tôt par les Iroquois sur la promesse de leur procurer des armes à feu, il sera finalement puni par les deux jeunes héros pour sa conduite répréhensible.

Commentaires

Le roman historique a déjà été très populaire dans les débuts de la littérature jeunesse au Québec. Des auteurs (surtout féminins) comme Suzanne Martel, Monique Corriveau, Eugène Achard et Marie-Claire Daveluy lui ont donné ses lettres de noblesse avant qu’il subisse une éclipse prolongée. On assiste cependant depuis quelques années à un retour en force du roman historique, peut-être par un effet de mimétisme de la littérature pour adultes qui exploite cette veine depuis le succès retentissant des Filles de Caleb d’Arlette Cousture.

Trafic chez les Hurons d’André Noël, troisième titre d’une série amorcée en l’an 2000, s’inscrit dans ce renouveau du roman historique chez les jeunes. Ce roman se situe au tout début de la Nouvelle-France, au moment où les Français tentent d’établir une colonie permanente en Amérique. Il y est surtout question du mode de vie respectif des Français et des Amérindiens (les Algonquins, les Iroquois, les Hurons) et de l’influence de la civilisation européenne sur les sociétés amérindiennes. Les ravages causés par l’eau-de-vie chez les peuples autochtones sont au cœur du récit. L’auteur dénonce les agissements immoraux de certains aventuriers français qui n’ont pas hésité à profiter de la dépendance à l’eau-de-vie des Amérindiens pour s’enrichir à leurs dépens.

Entre ces rappels des méfaits de l’alcool sur la vie sociale des Amérindiens, André Noël nous apprend que « les Algonquins ne se gênaient pas pour roter, péter » après un bon repas. Ailleurs, il note ceci sur l’éducation : « Pierre s’étonnait toujours de voir que les parents amérindiens ne punissaient jamais leurs enfants. » Cette remarque n’était pourtant pas nécessaire parce qu’on avait compris dans la scène qui précédait (et dans une autre plus élaborée qui confirme ce trait culturel) que les Amérindiens étaient très tolérants face aux enfants. Mais comme on est en littérature jeunesse, on dirait que l’auteur se sent obligé de souligner au crayon gras. La bonne littérature jeunesse n’évite-t-elle pas précisément ce piège ?

André Noël aime bien aussi l’exagération. Ainsi, le ciel de Québec s’obscurcit pendant quelques jours parce que les tourtes émigrent vers le sud ! « Un seul coup de feu suffisait à en tuer une douzaine. » On comprend pourquoi elles ont complètement disparu ! Par contre, l’auteur a respecté la vérité historique au sujet de Champlain. Celui-ci a bel et bien reçu une flèche dans la jambe et une autre dans le genou lors de la campagne de 1615 contre les Iroquois.

Roman historique, soit, mais Trafic chez les Hurons est-il aussi un roman fantastique ? À mi-chemin du récit, je me suis demandé si, hormis le fait que les deux jeunes héros (le Français Pierre Jalbert et Ahonque, l’Iroquoienne) ne vieillissent pas, il y avait d’autres raisons de classer ce roman parmi les œuvres fantastiques. Car ce seul fait, qui n’a pas d’incidence sur le récit, ne saurait suffire pour inclure Trafic chez les Hurons dans le corpus fantastique. Mais, heureusement, il y a plus : le cerf qui est à l’origine de l’éternelle jeunesse de Pierre et d’Ahonque apparaît au jeune garçon pour le sauver d’une mort certaine. Grâce à son intervention, Pierre est transporté dans les airs à bord de son canot jusqu’à Québec. Voilà, mine de rien, une nouvelle version de la chasse-galerie ! Un deuxième épisode nous laisse croire aussi que les bois de cerf qui ont été donnés à Ahonque lui ont permis de guérir le fils du chef Noqhwa.

Trafic chez les Hurons est un roman plus ou moins captivant. On est loin, à mon avis, de l’intérêt que suscitent, par exemple, les romans de François Gravel. Le lecteur développe une complicité avec ses personnages tandis que les héros de Noël nous laissent plutôt indifférents. La fin apparaît précipitée par l’impératif éditorial de ne pas dépasser 96 pages. Et Cadorette s’en tire décidément à bon compte.

On est en droit de se demander si c’est la fin de la série. Trois romans ont paru au cours de la même année, puis plus rien depuis, quatre ans plus tard. [CJ]

  • Source : L'ASFFQ 2000, Alire, p. 127-129.

Références

  • Courchesne, Danièle, Lurelu, vol. 25, n˚ 1, p. 79-80.
  • Dupuis, Simon, Lurelu, vol. 23, n˚ 3, p. 20.