Résumé/Sommaire
Deux amis, Marc et Michel, veulent construire un petit abri souterrain pour s’évader de leur quotidien. Ayant découvert une clairière dans la forêt avoisinante, ils commencent à creuser un trou dans le sol. À environ un mètre de la surface, Marc met au jour une trappe de métal. Il réussit à l’ouvrir et, suivi de son ami, il descend l’échelle qui s’enfonce dans la terre. Après avoir emprunté un tunnel, ils arrivent devant une porte métallique qui donne accès à une grande salle circulaire sur laquelle débouchent plusieurs portes. Les deux amis entreprennent d’explorer les pièces réparties autour de la salle centrale en forçant la poignée des portes. Ce qu’ils découvrent les stupéfie : une génératrice, un dortoir, une cuisine, un laboratoire, une fontaine d’eau, un atelier bien pourvu d’outils, un arsenal rempli d’armes, une abondante réserve de nourriture.
Tout indique que ce bunker souterrain a servi pour des expériences scientifiques pendant la Première Guerre mondiale comme le laissent croire les rapports qui se trouvent dans l’une des pièces. Cependant, la porte d’entrée s’est refermée et il est impossible de la déverrouiller. Marc est convaincu que la sortie se trouve derrière la porte n˚ 3 qui leur résiste. Au bout de quelques jours, la porte s’ouvre et Marc décide d’explorer les lieux. À la lueur de sa lampe de poche, il ne voit aucun mur ni plafond et il se sent épié par une présence invisible. Paniqué, il regagne la salle centrale et retrouve Michel, tout aussi terrorisé et prêt à tirer sur tout ce qui bouge.
Au huitième jour de leur réclusion, la génératrice qui fournit l’électricité et l’oxygène cesse de fonctionner. Les deux amis, dont les relations se sont détériorées par suite de leurs réactions différentes à cet environnement, n’ont plus le choix : s’ils ne veulent pas mourir, ils doivent franchir le seuil de la porte n˚ 3.
Commentaires
Ne cherchez pas La Trappe de Martin Doucet sur les rayons de votre bibliothèque municipale. Vous ne l’y trouverez pas. Il n’existe qu’un seul exemplaire à la Bibliothèque nationale et comme celui-ci fait partie de la collection de référence, il ne peut être emprunté. Il faut le lire sur place ou dans une bibliothèque près de chez soi, grâce au service de prêt entre bibliothèques. C’est cette deuxième option que j’ai choisie. Je sais bien qu’il aurait été justifié d’« oublier » ce livre, mais le souci d’exhaustivité à la base du projet de L’ASFFQ est tel…
Cela étant dit, je n’avais pas de hautes attentes à l’égard du roman de Martin Doucet. Publication à compte d’auteur, œuvre de jeunesse – l’auteur a tout juste vingt ans au moment de la parution : rien qui soit de bon augure. Au final, le résultat est moins nul que je le craignais. L’histoire est certes convenue mais Martin Doucet réussit à installer une tension constante dans son récit. Toutefois, l’écriture est lamentable et on ne compte plus les emplois fautifs de temps de verbe, les contresens et les fautes d’orthographe. Les adjectifs et participes passés sont mis à mal : « accroupit », « surprit », « le vent s’est tut », « son souhait ne sera pas exhaussé ». Des phrases ridicules comme « Il regarde sa montre, pour avoir un indice temporel de référence » ou fautives comme « C’est une sentence pire que les prisonniers que nous subissons » sont légion. C’est vraiment catastrophique côté écriture.
Hormis l’épilogue qui fournit la clé de l’histoire et permet de ranger La Trappe dans le corpus de science-fiction, tout le roman baigne dans un climat de peur, d’angoisse et de terreur proche du fantastique. L’atmosphère anxiogène y est pour beaucoup et l’auteur n’hésite pas à l’alimenter régulièrement. La découverte progressive des pièces et des indices prouvant l’existence d’expériences humaines secrètes participe de cet effet. Cependant, la transcription du journal de Marc – quatre courts chapitres – représente une mauvaise stratégie narrative car il ne fait que reprendre les informations que le narrateur omniscient a déjà livrées.
La Trappe fait penser à un épisode de la série Lost – écrite bien après le roman de Doucet – où un homme vit seul dans un complexe souterrain super-équipé et dont l’esprit est de plus en plus troublé par les conditions d’isolement. Marc et Michel réagiront de manière différente devant les événements, ce qui contribue positivement à la dynamique du récit.
À la lumière de l’épilogue, on mesure mieux à quel point les actions et décisions des deux personnages répondent à des stimuli induits dans le cadre d’une expérience behavioriste. D’où la prétention SF de l’œuvre qui demeure fragile si on prend en considération le fait que des expériences secrètes sur le cerveau ont été menées par des chercheurs de l’Université McGill dans les années 1950 pour le compte de l’armée américaine. Mais le thème de la manipulation et de l’homme comme animal de laboratoire constitue une des plus persistantes interrogations philosophiques soulevées par la littérature de science-fiction. L’espèce humaine évolue en fonction de son environnement mais évolue-t-elle librement ou quelqu’un crée-t-il des conditions artificielles pour orienter son évolution ? Qui est ce quelqu’un ?
Les chercheurs qui induisent des vies factices à Marc et Michel évoquent eux-mêmes, à la blague, la possibilité d’être des instruments aux mains d’une instance supérieure : « Et qui sait, peut-être sommes-nous aussi quelque expérience… » [CJ]
- Source : L'ASFFQ 1996, Alire, p. 75-77.
Références
- Croteau, Paul-G., imagine… 75, p. 92-93.