À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Parce qu’ils n’ont pas assez étudié, Maude, Ronald, Richard et Mireille échouent à l’examen final de leur cours de français. Leur professeur leur donne une seconde chance : ils ont quatre semaines pour composer une nouvelle « acceptable », sinon ils devront reprendre le cours. D’abord choqués par un défi qui leur semble insurmontable, les quatre compagnons font de leur mieux pour écrire une nouvelle. La tâche leur est facilitée par un chandail magique qui, apparemment, leur donne de l’inspiration.
Le texte de Mireille s’intitule « Tout pour la musique… Tout ? ». Une jeune femme décide d’étudier le piano, mais comme elle s’y prend assez tard – elle a vingt-six ans –, elle trouve les cours et la pratique plus difficiles que prévu. C’est d’autant plus frustrant que, chaque nuit, elle rêve qu’elle maîtrise son instrument infiniment mieux que le jour. Elle découvre que c’est son mari qui, à son insu, faisait jouer de la musique la nuit dans l’espoir qu’elle absorbe la technique pendant son sommeil. Mais cela explique-t-il le fait qu’elle a vu le fantôme d’un grand compositeur sortir du piano ?
Le texte de Ronald s’intitule « La Révélation ». Un adolescent amateur de science-fiction se réfugie un jour d’orage dans une mystérieuse maison abandonnée. Marie-Jo, une jeune fille de son âge, sourde de naissance, l’accompagne. Ils découvrent que la maison est un poste d’observation installé par des extraterrestres de Rigel, venus enquêter sur Terre pour ramener des descendants de leur peuple exilés des milliers d’années plus tôt. Marie-Jo est une de ces descendantes, mais elle refuse l’offre de retourner sur la planète de ses ancêtres. Elle préfère demeurer sur Terre. Les Rigeliens acceptent sa décision. Pour se protéger, ils effacent de la mémoire des deux ados tout souvenir de la rencontre.
Maude, de son côté, a écrit « Coma », une histoire qui la met en scène. Pendant un cours d’éducation physique, elle assiste à une démonstration d’escrime par Julie, une ex-championne. Le sport la passionne à ce point qu’elle s’inscrit aussitôt à des cours privés auprès de Julie. Sous la gouverne sévère de son entraîneuse, Maude devient rapidement une redoutable escrimeuse mais, lors de son premier tournoi, elle se blesse à la tête. Dans les profondeurs d’un rêve comateux, elle conclut un pacte avec une voix invisible : elle ferait n’importe quoi pour sortir du coma. Redevenue consciente, Maude s’aperçoit qu’elle est maintenant prisonnière du corps de Julie. Et cette dernière se réveille dans le corps de sa protégée, un jeune corps vigoureux qui lui permettra de redevenir la championne qu’elle était jadis.
Finalement, Richard compose « Andrée chante, pas moi ». Andrée a tout pour être heureuse. Elle aime son métier – enseignante au niveau primaire –, elle a une belle maison, une voiture… et un nouvel amoureux, Richard. Hélas, invitée chez des amis, Andrée est mal à l’aise pendant toute la soirée, et son comportement surprend ses hôtes. On découvre que la personne que l’on croit être Andrée est sa sœur jumelle Anne qui, avec l’aide de Richard, a tenté de se glisser dans la vie de sa sœur. Anne se rend compte qu’elle n’est pas plus heureuse qu’auparavant, et reprend sa vie de musicienne. Andrée n’en saura rien – grâce à une drogue, Richard l’avait gardée endormie tout ce temps.
Commentaires
Commençons par un petit problème de classification. Doit-on considérer Une seconde chance comme un roman ou un recueil de nouvelles ? L’éditeur n’a pas su choisir lui non plus puisque rien sur le livre ne permet de trancher. Puisque l’auteure s’est donné la peine d’intégrer les quatre récits dans un cadre aussi élaboré, sinon plus élaboré, que certaines des nouvelles, je classerai le livre comme un roman à tiroirs, surtout si on considère que cet aspect formel est un des éléments sympathiques de l’œuvre. Admettons aussi que si, dans la vraie vie, de véritables élèves du secondaire remettaient à leur professeur quatre textes écrits et construits avec autant de compétence, ils recevraient non seulement une excellente note, mais aussi des félicitations du professeur !
Le problème, bien entendu, c’est que les lecteurs d’un livre publié professionnellement sont en droit d’attendre plus que de la prose scolaire. L’écriture de Renée Amiot, bien que correcte, est platement utilitaire. Les personnages sont tout aussi peu développés. À l’instar de leurs prénoms, les deux garçons sont presque interchangeables – seules les filles Mireille et Maude expriment assez de sentiments pour qu’on croit à leur existence. Même constat au niveau des intrigues. La seule qui surnage, qui frappe l’imagination et s’ancre dans la mémoire est « Coma ». Est-ce une coïncidence s’il s’agit de la seule nouvelle où l’ordre du monde n’est pas rétabli à la fin ? Non seulement Julie réussit à s’emparer du corps de sa jeune élève, mais elle ne semble pas en éprouver la moindre culpabilité et rien dans la nouvelle ne laisse entendre qu’elle sera « punie » pour sa méchanceté. Salutaire et trop rare bouée d’altérité dans un océan de bons sentiments.
Car sinon, les trois autres histoires ne frappent pas l’imagination. « Tout pour la musique… Tout ? » est gentille et inoffensive, au mieux. « Andrée chante, pas moi » est un peu plus mémorable. Le thème du jumeau qui remplace son frère – ou sa sœur, dans ce cas – se prête effectivement à toutes sortes de fabulations réjouissantes, mais il aurait fallu un style plus dynamique pour soutenir le suspense et nous faire oublier à quel point le complot d’Anne et Richard n’est concevable qu’en faisant preuve du mépris le plus total pour les droits et les sentiments d’Andrée.
Quant à « La Révélation », le seul texte de science-fiction du lot, c’est aussi le seul qui aurait effectivement pu être écrit par un élève du secondaire, tant il est faible et truffé de clichés. Est-il vraiment permis, en 1999, d’obliger les protagonistes d’une histoire fantastique à se réfugier dans une maison hantée à cause de la pluie ? A-t-on encore le droit de baptiser un Rigelien « Apollon » ? Pourquoi les Rigeliens installent-ils leur poste de surveillance dans une maison abandonnée ? D’ailleurs, pourquoi se cachent-ils puisqu’ils sont d’apparence humaine ? Ne sont-ils pas à la recherche de leurs compatriotes ? Puisque la surdité est un bon indice pour reconnaître les descendants des habitants d’Orion, pourquoi n’ont-ils pas déguisé leur base en institut pour les sourds ? Il est clair que Ronald – et Renée Amiot ? – n’a pas beaucoup réfléchi à son histoire. [JC]
- Source : L'ASFFQ 1999, Alire, p. 11-13.