À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Bill Flakes, archéologue, se rend à Dangertown pour rencontrer des collègues. Il s’arrête pour manger à Green Lake. Mais le restaurant se transforme soudain en garage ; le village est maintenant désert. Bill finit par rencontrer une jeune femme, Ariane, qui lui explique que le village est maudit, et habité par des morts-vivants appelés Broucolaques. Elle l’emmène à une chapelle où se terrent les derniers humains survivants. Le soir même, des Broucolaques viennent rôder autour de la chapelle. Le groupe sort pour les attaquer, mais les Broucolaques les massacrent. Bill s’enfuit dans la forêt. Épuisé, il finit par s’endormir.
Pendant ce temps, les amis de Bill, Ben et Danis, l’attendent à Dangertown. Apprenant qu’on a retrouvé sa jeep accidentée en forêt, ils convainquent Maurice, le garagiste, de les y conduire le soir même.
Bill se réveille dans une maison richement meublée : son hôte est Friedrich Zwölfte, qui se décrit comme le maître absolu de la Baie des Roses, le nom de la région où a été bâti Green Lake. Se rendant compte que le vin que Zwölfte lui offre est en fait du sang, Bill se révolte. Son hôte l’envoie au cachot, où il est bientôt rejoint par Ariane, qui a survécu au massacre.
Entre-temps, la remorqueuse du garagiste capote lorsqu’il veut éviter un mendiant repoussant qui se tient au milieu de la route. Maurice s’enfuit, et Ben et Danis s’enfoncent seuls dans la forêt de la Baie des Roses. Ils y découvrent des cabanes de bois avec des squelettes suspendus aux arbres. Ils passent la nuit à cet endroit. Danis, à son réveil, se rend compte qu’il est devenu un loup-garou. Éperdu d’horreur, il erre dans la forêt jusqu’à rencontrer Friedrich Zwölfte, qui lui rend son apparence antérieure, puis le ramène d’un siècle dans le passé et l’emmène chez lui. Il lui présente deux amis, sir Wallace et Lord Flemming.
Un orage éclate. Zwölfte emmène ses invités à son laboratoire, où il va tester une machine, le caloporteur, qui fonctionne avec l’énergie de la foudre et permet de voyager n’importe où à travers le fluide électrique. Lord Flemming essaie le caloporteur et est volatilisé quand la foudre le frappe. Danis se réveille alors ; tout cela n’était-il qu’un rêve ?
Pendant ce temps, Maurice est revenu à Dangertown. Le récit de son accident convainc la population qu’elle se doit d’agir. Le shérif décide du plan d’attaque et convoque une réunion pour 21 heures. Puis il prend la route pour aller rencontrer quelqu’un. Hélas, en traversant un pont, il commet l’erreur de venir en aide à une conductrice en difficulté, qui l’obnubile de ses charmes…
Ben et Danis ont repris leur marche et rencontrent Gérôme, un autre survivant de l’attaque des Broucolaques. En descendant une falaise, ils sont attaqués par des hirondelles et Danis chute dans la rivière. Il parvient à regagner la berge loin en aval, au pied du pont où pend le cadavre du shérif, étranglé par la belle inconnue. Danis remonte le cadavre, qui se transforme en un démon ailé. Le démon s’envole en direction de Dangertown ; Danis le suit au volant de la camionnette du shérif.
Finalement, Danis, Ben et Gérôme, ainsi que les villageois partis de Dangertown se retrouvent tous à Green Lake. Le groupe passe par des tunnels souterrains pour se rendre à la Baie des Roses. Un orage se prépare. Bill Flakes et Ariane se sont enfuis de leur cachot et voient Zwölfte au centre d’une assemblée de ses monstres. Le groupe armé fait irruption, les morts-vivants sont massacrés. Zwölfte s’enfuit, mais une lumière verte issue de l’orage le poursuit. Elle prend forme humaine : c’est Lord Flemming. C’est par lui que sera finalement détruit Zwölfte.
Commentaires
Le comble de l’horreur ! Hélas, pas au sens où l’auteur le voulait. Brunelle accouche de fautes d’orthographe monstrueuses, massacre la typographie, torture la grammaire et crucifie la syntaxe. Son style est d’une maladresse qui dépasse tout ce à quoi on pourrait s’attendre, même d’un auteur de douze ans. Le vocabulaire est incohérent, incorporant des mots d’argot français et de joual dans la bouche d’un Américain. La narration est d’une naïveté d’écolier, avec ses constantes indications du genre « pendant ce temps à Dangertown… ».
Juste pour vous donner une idée : Brunelle épelle piédestal « pied d’estalle », conjugue s’asseoir au passé simple « je m’assayai », considère que, puisque se prosterner est synonyme de s’étendre, on peut écrire « une paroi de roc se prosternait devant lui ». Son vocabulaire, s’il comprend certains mots recherchés, présente toutefois des lacunes ahurissantes. En conséquence, il se trompe souvent complètement de mot, employant « bon sens » pour bon sang, « escrocs griffes » pour escogriffes, et pour suppôt… « suppositoire » ! Soulignons toutefois les scrupules de l’auteur, qui met toujours le verbe grouiller entre guillemets, craignant que ce ne soit pas tout à fait français !
Le procès du roman ne s’arrête pas là. Même en faisant abstraction de son langage exécrable, Vampyres reste un échec total. L’intrigue est invraisemblable et confuse. Les personnages se conduisent comme de parfaits imbéciles. Le meilleur exemple en est la scène du caloporteur. Quand Lord Flemming émet de sérieux doutes sur la sécurité de l’appareil, Zwölfte déclare à Flemming que, puisque c’est lui qui doute, c’est lui qui doit essayer la machine. Et Flemming se rend à la logique de l’argument.
En ce qui a trait aux idées, elles n’ont rien d’original, c’est même tout le contraire. Du début à la fin, le lecteur nage en plein cliché, mais en cliché filmique. Vampyres pourrait avoir été écrit par un gamin de neuf ans régurgitant pêle-mêle les films d’horreur qui lui auraient donné ses pires cauchemars. Des preuves ? La lumière de la lune teint un mur « d’un bleu rêveur » – lune d’ailleurs décrite la phrase d’avant comme un projecteur illuminant la scène. L’attaque des Broucolaques pourrait être tirée de Dawn of the Dead et celle des hirondelles des Oiseaux d’Hitchcock. Quant à la transformation du shérif, elle aurait dû être commanditée par les « Twins FX » de la télé communautaire.
On a vraiment l’impression que Brunelle ne connaît l’horreur que par les films… et par les jeux de rôles : quand le garagiste accepte de conduire Ben et Danis à la forêt, nos deux archéologues ont des heures à perdre (Maurice ne ferme son garage qu’à 23 h 30), mais ce n’est pas assez de temps pour penser à acheter des tentes et des sacs de couchage en vue de leur expédition. Ce phénomène est typique des jeux de rôles, où le maître de jeu doit parfois faire passer le temps très vite ; les joueurs peuvent alors oublier un détail que leurs personnages n’auraient normalement pas négligé. Le reste de l’épisode tend à confirmer l’hypothèse que cette section de Vampyres a été tirée directement d’une séance de jeu.
C’est d’ailleurs cela qui est vraiment effrayant dans ce livre : de constater qu’à notre époque, on peut s’auto-consacrer auteur de fantastique sans jamais avoir rien lu. Si on a joué deux fois à Call of Chthulhu et vu tous les Nightmare on Elm Street, on est un écrivain achevé.
Vous me trouvez trop cruel ? C’est que vous n’avez pas lu la prétentieuse préface, où l’auteur proclame son talent haut et fort. Il faut avouer toutefois que Brunelle y donne une explication fort utile de la symbolique du vampirisme. Et c’est d’ailleurs – ultime ineptie – la dernière fois qu’il y aura un vampire dans le livre. Car, malgré son titre, Vampyres ne contient pas un seul vampire ! Il s’y trouve des zombies dynamisés (les Broucolaques), un démon-gargouille, des mendiants surnaturels, des anthropoïdes à peau verte, une succube, un loup-garou onirique et un squelette à crocs, mais d’émules de Nosferatu, point. Friedrich Zwölfte boit son sang dans un verre et a tout d’un sorcier, mais rien d’un Dracula.
Vous aurez compris que, si Vampyres est sans conteste le plus mauvais roman de toute la SFQ, c’en est aussi le plus drôle. L’humour involontaire de l’auteur atteint des sommets dignes de passer à l’histoire, et c’est pourquoi en fin de compte je vous recommande l’achat du livre… pour vous payer une pinte de bon sang. [YM]
- Source : L'ASFFQ 1993, Alire, p. 43-46.
Références
- Beaulieu, Natasha, Temps Tôt 26, p. 51.