À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Kurt Lansen, Jean Langlois et Pierre Fresnoy, respectivement aviateur, navigateur et ingénieur, forment un trio d’amis impliqués dans un projet spatial international. Lors d’une plongée sportive en Méditerranée, ils sont enlevés par des Atlantes, qui vivent depuis dix mille ans dans une cité sous-marine. Parce que l’atmosphère de Vénus risque de ne pas leur convenir, ils ont besoin d’autres Terriens pour piloter leurs fusées, déjà prêtes, et aller chercher sur cette planète le minerai de duritanium, indispensable au renforcement de la coupole qui les protège et à la génération de leur énergie.
En route, les trois jeunes Canadiens sont capturés dans l’espace par des Baïriens, humanoïdes originaires des environs de Sirius, qui pour leur part ont l’intention de coloniser Vénus. Sans animosité, les Baïriens et les trois Terriens se posent ensemble sur la planète, rendue habitable par les machines que ces extra-terrestres avaient envoyées à l’avance.
Tandis que Nixa, la fille du président atlante, est folle d’inquiétude pour Pierre Fresnoy, Kurt Lansen pour sa part s’est instantanément amouraché de Zolta, une belle Baïrienne. Le couple est capturé par une autre race d’extra-terrestres, d’allure simiesque mais télépathe. Originaire de la planète Ronca, ce commando n’est que l’avant-garde d’un projet d’invasion de la Terre, laquelle agression ne sera qu’une étape mineure dans la conquête de l’univers.
Par chance, Nalt et son équipage, autres Baïriens qui passaient par là, ont capturé le vaisseau roncain, délivré Lansen et Zolta. Les Terriens seront aimablement ramenés en banlieue d’Ottawa, avec une cargaison de duritanium destinée à Atlantide et une ambassade qui proposera une alliance pour faire face à la menace de Ronca.
Commentaires
Où commencer le commentaire d’une œuvre pareille, sinon en rappelant le contexte de sa publication et celui de sa critique ? Futur philosophe, féministe et théoricien de la SF, Guy Bouchard avait dix-huit ans lorsque Fides a accepté ce manuscrit ; la quatrième de couverture ne mentionne pas à quel âge il l’avait écrit. À l’évidence, il avait lu des romans du Fleuve Noir Anticipation, car il paraît familier avec certains tropes de la science-fiction – antigravitation, terraformation (sans le nom), télépathie. Sur certains points, le brillant collégien avait fait ses classes ; sur d’autres points, on voit que sa culture scientifique n’était qu’un mince vernis : témoin une fusée « violemment déportée vers la droite » dans l’espace (p. 49) – et ne parlons pas de la manœuvre pour éviter une comète.
L’autre contexte à énoncer, c’est celui de la critique : comment lire un roman publié pour les jeunes de 1961, lorsqu’on est un adulte (et directeur littéraire d’une collection pour jeunes) une quarantaine d’années plus tard ? Ce critique-ci, en tout cas, ne parvient pas à s’abstraire entièrement du contexte. Il ne peut s’empêcher de sourire (de soupirer ?) devant les repas de pilules multicolores, devant le fait qu’il suffise d’une semaine de formation pour apprendre à piloter les fusées d’une technologie futuriste, devant le fait que tout le monde parle (ou télépathise) français par la grâce de sciences avancées. Elles ne seront que laconiquement évoquées, ces sciences et les omnipotentes sources d’énergie qui en découlent, alors que pour sa part, le principe du sas sera expliqué pas moins de deux fois.
Et si, d’une part, on peut ironiser sur le fait que les Baïriens de Sirius ne sont que des Humains habillés différemment, il ne faut pas oublier qu’une série culte (Star Trek), véritable institution culturelle pour deux générations d’amateurs de SF, a basé des centaines d’épisodes sur cette invraisemblance.
Il reste donc à critiquer le montage du roman (les épisodes finaux littéralement expédiés, tandis que ceux du début étaient inutilement détaillés), sa structure (brève apparition, aux deux tiers du récit, d’enquêteurs gouvernementaux cherchant les trois Terriens disparus), le sentiment d’improvisation qui se dégage à partir de la moitié du récit. Manifestement, il n’y a guère eu de direction littéraire à l’œuvre ici, d’où les personnages unidimensionnels, les belles blondes victimes de coups de foudre instantanés, les pirouettes narratives, les raccourcis ahurissants et, disons-le, quelques beaux clichés bien gras, qui ont fait les belles heures du concours de maltraitement de textes lors des congrès Boréal.
Il y aurait beaucoup à apprendre sur l’histoire des mentalités en disséquant de petits romans comme celui-ci. Si l’on s’intéresse à l’évolution des idées à l’échelle microscopique, il serait intéressant d’établir vers quelle date on a commencé à écrire « la Terre » avec une majuscule (ce qui n’est pas le cas ici). Je soupçonne que c’est l’avènement de l’ère orbitale (jeune de quatre ans lorsque ce livre est paru) qui a graduellement imposé aux gens la notion que le contenu d’un pot de fleurs et le monde sur lequel vivait l’humanité méritaient chacun un traitement typographique différent…
Broutilles que tout cela. L’important n’est-il pas de savoir que Pierre Fresnoy et la belle Nixa se fiancent à la fin ? [DS]
- Source : La Décennie charnière (1960-1969), Alire, p. 22-24.
Références
- Lortie, Alain, Requiem 16, p. 15.
- Vincent, Thierry, Lurelu, vol. 20, n˚ 2, p. 69-70.