À propos de cette édition

Éditeur
Prise de parole
Genre
Fantastique
Longueur
Novella
Format
Livre
Pagination
156
Lieu
Sudbury
Année de parution
1998
ISBN
9782894230893
Support
Papier

Résumé/Sommaire

« Je suis née à l’aube, quelques semaines avant l’an mil. » Seule de son espèce – du moins le croit-elle –, Elvire aura bientôt 998 ans, même si rien n’y paraît. Elle n’a jamais fait son âge : au bout de cent ans, elle en paraissait à peine six.

Répondant à l’invitation de son conjoint Frédéric – un être « normal », lui –, Elvire amorce pendant ses vacances un vertigineux retour dans le passé afin de se remémorer ses origines. Son récit nous apprend qu’elle aura tôt fait, dans son enfance, de se rendre compte de sa singulière condition. Son long et sinueux parcours la mènera notamment en religion, mais à l’amour de Dieu se substituera un amour plus terrestre de qui elle aura un garçon, Hugues.

Ce n’est qu’à la fin du xxe siècle, pendant ses vacances, qu’Elvire retrouvera son fils, maintenant âgé de près de six cents ans. Elle apprendra enfin ce que fut l’existence de son fils depuis le moment où il l’a quittée pour devenir marin : dans l’un de ses nombreux périples, il a laissé un enfant au Japon. Cet enfant existe-t-il toujours 150 ans plus tard ? Le hasard satisfera leur curiosité et les mènera à Tokyo où ils retrouveront Yukiko, professeure : le récit de la fille de Hugues et petite-fille d’Elvire montrera qu’elle aussi était fascinée par ses mystérieuses origines.

Elvire rassemble sa « famille » à Ottawa où il lui apparaît que leur don s’érode : Hugues et Yukiko paraissent tous deux plus vieux qu’Elvire au même âge. Mais la recherche de leurs ascendances trouvera un sens nouveau au hasard d’une promenade en forêt : Elvire se découvrira une rare acuité perceptive qui lui permettra de mettre au jour l’identité réelle de sa mère et les origines maléfiques de son don, sans doute éternel.

Commentaires

La Vie empruntée est en soi un pari : raconter l’existence de trois êtres dont la longévité s’étend, au total, à plus de dix-sept siècles, en moins de 160 pages, sans ennuyer le lecteur ! Et ce pari est fort réussi. Il y a dans ce roman une mesure certaine dans l’expression qui condense, résume des dizaines de siècles d’existence sans donner l’impression qu’on nous en a trop dit ou qu’il manque quelque chose. L’écriture y est élégante, d’une rare fluidité, et elle fera sans doute pardonner la très grande part de hasard qui mène aux retrouvailles entre les protagonistes.

La fantasticité de ce récit est tributaire de la plume feutrée d’Estelle Beauchamp. Loin de paraître comme une rencontre problématique entre le possible et l’impossible, la longévité des personnages, assumée, devient le prétexte à une patiente recherche des origines qui se dévoilent par bribes. La narration d’Elvire, dans les premier et dernier chapitres du roman, ainsi que celles de Hugues et de Yukiko, le temps d’un chapitre chacun, ouvrent à un univers intérieur des plus fascinants où sont exposées les splendeurs et les misères de leur don.

Toutefois, lorsque vient l’explication de ce don, le thème fantastique de la sorcellerie n’est pas introduit de façon spectaculaire ou sensationnelle, mais presque comme allant de soi. L’auteure exploite en ce sens la facette magique, presque heureuse, d’un thème qui aura souvent donné naissance à des intrigues autrement plus conflictuelles. En ce sens, l’approche fantastique de Beauchamp est résolument contemporaine. La finale ouverte n’étonnera pas : elle s’avère la seule issue acceptable pour le lecteur qui souhaiterait que ce court roman qui en dit long ne se termine pas.

De par sa thématique de la mémoire des origines, ainsi que par la grande qualité de son écriture, La Vie empruntée constitue une œuvre qui pourrait bien séduire un large public peu habitué aux récits fantastiques. [CG]

  • Source : L'ASFFQ 1998, Alire, p. 15-16.