À propos de cette édition
Résumé/Sommaire
Le jeune Zomlok, d’origine inconnue, vit en forêt sur la planète Zoomia, à l’écart des Stépaniens belliqueux, responsables de la quasi-extermination des Sylvaniens nomades. Fuyant leur hostilité, il élit domicile au bord d’un cratère formé jadis par l’impact d’un météorite. Il découvre des fruits bizarres dont la fumée, si on les expose au feu, vous transporte dans un autre monde.
Commence alors pour Zomlok un périple dont la première escale est Tatz, un astéroïde creux habité par les Azbêtas, parias de la planète Hurta. Il s’échappe de cet asile-prison et fait connaissance avec l’oiseau-trompette, gardien du monde d’Oniria, qui le conduit au Grand Axe. Ce passage spatio-temporel mène Zomlok au Grand Tourbillon, lequel l’entraîne à son tour à l’île de Toolaän où il est couronné prince. Le franchissement d’un miroir le transporte ensuite sur Wabania, où il fait une expérience de décorporation.
Las de sa « mirobolante odyssée », Zomlok se fait conduire sur Horrus, planète dévastée, d’où il sait pouvoir retourner sur Zoomia. La rencontre d’un vieux shaman dans les montagnes de Zoomia l’amène à se choisir un but : avec ses pouvoirs, il rassemblera les Sylvaniens, leur assurera un avenir et rétablira la paix sur la planète. Des extraterrestres apparaissent pour lui apprendre qu’il est leur descendant, qu’il appartient au peuple des « Jardiniers de l’Espace ».
Commentaires
Le Voyage de Zomlok est à peu près un roman de SF. J’écris « à peu près » car la SF de Couture semble plutôt malléable : magie, alchimie, chamanisme et grimoires se joignent allégrement à ce manège de planètes, et les mots univers, monde et planète semblent d’ailleurs interchangeables sous la plume de l’auteur. Faut-il ajouter que la vraisemblance ne le préoccupe nullement ? Sur Tatz, la gravité est plus forte « au bas » de l’astéroïde, lequel a les dimensions d’un gros immeuble. Par ailleurs, d’un « monde » à l’autre, les gens ont la même apparence, comprennent la même langue et respirent (présumément) le même air. Sur Oniria, « sans lune et sans soleil », il semble pourtant faire clair. Ailleurs, une planète extrêmement ancienne orbite autour d’un soleil bleu.
L’aspect vraisemblance serait sans importance si l’œuvre établissait sa valeur en tant que roman initiatique, ou philosophique. Mais Le Voyage de Zomlok n’offre qu’une philosophie de kiosque à revues, et ses tentatives de mysticisme demeurent très superficielles.
La narration, surtout dans les premiers chapitres, est tissée de contradictions, mineures mais fréquentes, où l’auteur semble oublier ce qu’il a affirmé ou sous-entendu un paragraphe plus tôt ; c’est vrai en particulier pour la mise en scène des lieux et mouvements du personnage sur Zoomia (après, ça n’a plus d’importance…).
L’approche diégétique est celle d’un narrateur omniscient, mais Couture ne crédite pas le lecteur d’autant d’intelligence : « Zomlok », précise-t-il par exemple au terme d’une scène claire et simple, « venait de se faire tromper de la manière la plus vile qui soit. Il avait été drogué et il allait bientôt être emmené de force… » (p. 50). Récapitulation inutile : le lecteur avait non seulement compris, mais il avait deviné bien avant que Zomlok ne tombe victime du guet-apens.
Parfois démuni, Zomlok semble à d’autres moments partager l’omniscience du narrateur, sachant tout, par exemple, d’un nouveau personnage soudainement apparu. Le héros a un comportement très posé, mesuré, conscient, comme si l’auteur voulait en faire un bouddha : souvent assis en lotus, aussi exalté que son créateur littéraire, Zomlok « essaie de vivre chaque instant le plus intensément possible, gavant ses sens des parfums et des couleurs de la vie. »
Convenablement écrit par ailleurs, voilà un roman tendu d’hyperboles, de superlatifs et de mots relevés. Zomlok ne marche pas, il déambule, il a des « fantaisies déambulatoires ». Certains humanoïdes, au lieu d’être simplement pâles, ont « un teint d’albâtre ». La lune Mani n’est pas blanche, elle est « mormoréenne », et le paysage qu’elle éclaire n’est pas seulement splendide, il est « d’une splendeur grandiose ». On ne rencontre pas de chiens, mais des « dogues » et des « canidés ». Une petite boule verte, précise l’auteur pour qu’on comprenne bien, est « de forme sphéroïdale ». Quant au jeune Zomlok, jamais il n’est désigné « le garçon » ni « le jeune homme ». Il est plutôt « l’humanoïde », « le bipède » et même, une fois, « le paladin au teint ambré ».
Mieux écrit, cela pourrait s’apparenter à la purple prose de certains auteurs anglo-saxons du tournant du siècle. Mais la pléthore d’épithètes masque mal la minceur de cet univers. Le nombre de planètes visitées, et leurs noms, ne parviennent pas à créer une impression d’exotisme (surtout quand, sur Zoomia, on cueille « atocas, bleuets et groseilles » !). Le héros (et le lecteur à sa suite, s’il a la patience de continuer), traverse une série de décors peints et quelques praticables, croisant des figurants à l’occasion.
« Roman plein de symboles », affirme le texte de la couverture quatre, « c’est toute la société – et ses façons de faire – qui est mise en cause… un roman qui nous fait passer par une gamme infinie d’émotions ! » Bien pauvres symboles, bien courte remise en cause, et bien faible gamme d’émotions : Le Voyage de Zomlok est un petit tour de manège ennuyeux, vite oublié. [DS]
- Source : L'ASFFQ 1988, Le Passeur, p. 57-59.
Références
- Cloutier, Georges Henri, Solaris 82, p. 18.
- Payette, Louise, La Frontière, 07-06-1988.