À propos de cette édition

Éditeur
Faerie
Genre
Fantasy
Longueur
Novelette
Paru dans
Faerie 2
Pagination
13-43
Lieu
Lebel-sur-Quévillon
Année de parution
1987
Support
Papier

Résumé/Sommaire

La Reine magicienne Nimeya voulait faire de sa fille Albanye une magicienne. En vain : celle-ci voulait être une femme ordinaire. Par contre, Malanye, sœur d’Albanye, désirait devenir magicienne, ce que la mère refusait. Dans un accès de colère, elle punit un jour ses deux filles : Malanye devint une montagne et Albanye, une simple mortelle. Durant des siècles, plusieurs descendantes d’Albanye ont tenté sans succès de délivrer Malanye de son sort. Seule la princesse Alyne réussira, sans le savoir, et au terme de nombreuses embûches.

Commentaires

Élisabeth Vonarburg continue de nous présenter différentes facettes de son talent. Après la SF et le fantastique, cette auteure nous offre son premier texte de fantasy. Un texte qui ressemble à un exercice de style, puisqu’on y retrouve les caractéristiques du conte merveilleux. Mais aussi un texte où on sent que l’auteure s’est amusée.

En effet, Vonarburg a réuni de nombreux ingrédients formant le conte merveilleux type : une princesse, un dragon, de la magie, un obstacle suivi d’un dénouement heureux. Bien entendu, le conte subit ici quelques “modernisations”. L’héroïne ne veut pas suivre le chemin traditionnel dévolu à la femme. C’est elle qui luttera contre le dragon et délivrera un chevalier en détresse. Cette subversion fonde littéralement le récit où sont opposées deux visions de la femme. Albanye est douce et veut devenir une femme ordinaire (contradiction, non corrigée par l’auteure, avec sa condition effective de princesse) : se marier et avoir des enfants. Malanye, par contre, désire faire de la magie et Alyne rejette sa future existence de reine et de mère. Est sous-entendue aussi la solidarité qui unit les femmes, de même qu’une conspiration du silence entourant le médaillon et le dragon.

Récit initiatique ? Le silence entoure des tabous : on ne peut voir dans le miroir qu’à l’adolescence. Alyne ne réalise pas que le dragon est une femelle pleine. La description du tunnel qui nous conduit au centre de la montagne apparaît comme l’image – à peine déguisée – du vagin et du ventre féminin. En effet, la grotte (la “bulle” dans le texte) est couverte de rubis (couleur rouge) ; un lac en nappe le fond. L’épée doit être utilisée sans faire couler le sang (non celui de l’hymen mais celui des menstruations), c’est-à-dire dans le but de féconder. Ce n’est donc pas par hasard que le dragon accouche dans la grotte.

Cette apparition de la sexualité découvre le tabou et délivre les deux femmes de leur sort/punition. Le médaillon est donc une métaphore de la sexualité. Le miroir qui le constitue ne reflète, ne peut renvoyer aucune image de la femme avant que celle-ci puisse s’y reconnaître comme être sexué. Ce conte invite à l’acceptation de la sexualité féminine. Mais n’est-ce pas le propos du conte de fées en général ?

C’est donc à escient que nous avons parlé de l’amusement de l’auteure. Vonarburg a joué avec les prémisses génériques explicites et implicites du conte merveilleux. Le style adopté nous indique que son texte est destiné à un public jeune. De plus, le fait qu’il soit narré par un dragon souligne l’enseignement tacite du texte. L’atmosphère merveilleuse a été bien rendue, discrètement rehaussée d’humour.

Cet humour, justement, pose une distance entre l’auteur et son produit fictionnel. Car le texte demeure au niveau de l’exercice de style et possède quelques points d’achoppement. Le ton de la narration n’indique aucunement la présence d’un narrateur dragon. De plus, cette narration n’est ni fluide ni aisée. Le texte est truffé d’explications mal placées – qui alourdissent le texte. Manque de “peaufinage”, peut-être ? Il règne dans ce texte un petit air d’improvisation. Ce qui n’a rien de rebutant, bien sûr. Mais on s’attend à plus de la part de Vonarburg.

Un exercice d’écriture sympathique. [SB]

  • Source : L'ASFFQ 1987, Le Passeur, p. 188-189.